Établissement privé pour garçons sous contrat d’association avec l’État

Stage au Venezuela

Le voyage au Venezuela

Partir à l’étranger durant trois semaines, à l’autre bout du monde pour son stage de seconde n’est pas toujours facile. Je me suis senti à la fois tiraillé par le désir de découvrir une autre culture et l’appréhension de quitter ma famille.

Partir au Venezuela m’a permis de mieux connaître certains de mes cousins (une partie de ma famille), de parler espagnol, de m’initier au monde du travail, de partager des passions communes et de rencontrer des personnes hors normes et uniques.

Désormais, je n’ai qu’une envie, c’est d’y retourner dès que possible.

Le Venezuela

Avec environ 30 millions d’habitants, le Venezuela est devenu l’un des pays les plus pauvres du monde. Selon les dernières données de la Banque mondiale, plus de 30 % de la population totale vénézuélienne vit sous le seuil de pauvreté. En outre, la crise pétrolière et la situation politique actuelle n’ont pas aidé à améliorer les conditions de travail dans le pays : le taux de chômage a augmenté considérablement ces dernières années, passant de 8,51 % en 2010 à presque 30 % en 2018, la dette nationale représente un quart de son produit intérieur brut et la dette extérieure ne parvient pas à reprendre son souffle.

Avec la crise économique et sociale que subit le pays, plus de 5 millions de Vénézuéliens ont quitté le pays en 10 ans.

Le poids de la crise vénézuélienne dans le monde pèse lourd. Non seulement la politique est en jeu, mais aussi l’économie de tous ceux qui traitent avec le Venezuela. En définitive, tous les regards sont tournés vers ce pays qui possède une bonne partie des réserves de pétrole du monde. De plus depuis 2017, c’est le pays le plus dangereux au monde, et Caracas la ville plus violente du monde. Conscient de tous ces éléments durant mon séjour j’ai toujours été accompagné pour des raisons de sécurité.

Durant mon stage j’ai passé une semaine à travailler au sein de l’Hacienda Santa Teresa, à découvrir les services, et à travailler la terre notamment dans les plantations de café, puis les deux semaines suivantes je me suis investi dans le projet ALCATRAZ, en allant dans les écoles chercher les jeunes et surtout en les entraînant au rugby.

Cette Hacienda a été fondée en 1796 et située dans la vallée montagneuse d’Aragua. L’Hacienda est plus qu’une maison. Elle a résisté aux guerres, aux révolutions, aux invasions et même aux dictateurs. Il y a toujours eu de la canne à sucre, du café, du cacao et depuis 1830, il y a toujours eu du rhum. L’Hacienda Santa Teresa représente la réussite, malgré les épreuves que la vie réserve.

Alcatraz

Le projet ALCATRAZ est né en 2003 d’une attaque à main armée auprès d’un garde de l’Hacienda qui surveillait le dépôt d’armes privées de l’hacienda. Les malfrats ont été rapidement arrêtés.

Le propriétaire de l’hacienda, Alberto Vollmer, mon cousin, leur donne le choix entre effectuer leur peine en prison ou travailler gratuitement à l’hacienda pendant trois mois, en échange du gîte et du couvert. Les trois bandits choisissent immédiatement la seconde option. Au passage, José Arieta demande si quelques membres de son clan peuvent également venir travailler, ce que le propriétaire accepte.

Le lendemain, ce ne sont pas trois, ni même une dizaine, mais bien vingt-deux jeunes hommes qui se présentent à la fabrique. Vingt-deux, comme le nombre de joueurs admis sur une feuille de match à l’époque. C’est alors que l’idée naît chez Vollmer : pendant trois mois, faire travailler tous ces malfrats à la montagne, loin de la violence urbaine, en les initiant à la pratique d’un sport qu’il a lui-même découvert pendant un séjour en France, le rugby.

Réconciliation

L’histoire aurait pu se terminer là, et de façon tragique. En effet, un autre gang rival, El Cementerio, voit là l’occasion « de marquer et transformer l’essai ». En se proposant de rejoindre le projet, ils pensent pouvoir exécuter leurs ennemis jurés, voire cambrioler l’hacienda. Là encore, A. Vollmer, est à l’origine d’un nouveau tournant. En forçant les rivaux à discuter sans armes, il inverse la pression et parvient à convaincre le nouveau gang de participer pour de bon au projet. Les deux bandes rivales effacent leurs querelles et se réconcilient. Trente-cinq paires de bras supplémentaires rejoignent ainsi le groupe.

Pour celui qui dirige Santa Teresa, le rugby est l’activité parfaite pour faire rentrer ces âmes dans le droit chemin. “Le rugby est un sport d’équipe, et eux, ils ont l’habitude de travailler en groupe, en bande. Ils ont beaucoup de violence en eux et ce sport leur permet de la canaliser intelligemment. Il y a dans le rugby tout un système de valeurs et de règles complexes auquel ils doivent s’adapter et qui leur apporte les cadres dont ils ont besoin.”

Aujourd’hui, le projet Alcatraz compte 5 entraîneurs, 300 jeunes pratiquants, le rugby de 5 à 15 ans. Il se hisse désormais à la troisième place du classement national à XV, et a quasiment écarté toute concurrence à VII. En lettres de sang sur leur maillot, ses joueurs affichent désormais leur nouvelle devise, témoin de leur reconversion : “Zéro violence.”

Ce projet aujourd’hui continue avec les jeunes. Ce sont donc des personnes ayant beaucoup appris de leur passé qui se mettent à entraîner des jeunes au rugby au lieu d’aller perdre leur temps dans la rue. Le projet Alcatraz étant une association, ils développent également un accompagnement social et éducatif auprès des jeunes.

En effet, lorsque les jeunes arrivent le matin dès 8h30 le rugby débute jusqu’à 10H45, puis vers 11h le repas arrive fourni par l’association. Ensuite, ils laissent la place à d’autres jeunes afin que le maximum d’enfants puissent y participer. Ainsi, j’ai eu l’occasion de les entraîner et de jouer avec eux.

Chaque jour lorsque j’allais au rugby avec ces jeunes des familles démunies. Je ressentais une joie profonde venant d’eux et ils étaient émerveillés qu’un étranger viennent jusqu’à eux. La question la plus fréquente des jeunes du rugby fut : cuando vas a regresar ?

Petite pépite, grâce à mon club de rugby, le Rugby Club Suresnes, nous avons rendu les enfants heureux en leur faisant don d’affaires inutilisées (tee-shirts du club, shorts, crampons…).

Durant mon séjour j’ai eu la chance d’assister à un tournoi de rugby à 7 de prisonniers organisés par la Fundacion Santa Teresa. Ce tournoi permet aux prisonniers de sortir du cadre pénitentiaire et d’entrevoir leur famille. Cela leur fait oublier leur passé et ils sont fiers de montrer qu’ils sont en train de changer. En participant à ce projet ils peuvent avoir une peine de prison plus courte et psychologiquement ils se sentent utiles.

En tant que joueur, je reste marqué par les valeurs transmises par ce projet social et éducatif car à travers le rugby ces jeunes de la rue apprennent

  1. Humilité
  2. Respect
  3. Discipline
  4. Travail en équipe
  5. Esprit sportif

Ce stage m’a permis de découvrir la vie active, le travail de la terre et je ressors grandi de cette expérience et impressionné de la force du projet Alcatraz. Cette expérience fut formidable.

En effet, mon cousin a su faire preuve de créativité, de rapidité, d’humanité et il cherche toujours à réintégrer les jeunes de la rue en leur donnant un avenir meilleur.

Rafael Levesque (promo 2025)